Chaînes faites entièrement à la main. ( 13 septembre 2009 )

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Avant propos.

Une chaîne est une succession de maillons passant les uns dans les autres. Son esthétique dépendra largement de la régularité de sa fabrication.

Pour y arriver, il faudra bien choisir le diamètre du fil avec une belle qualité de surface, et veiller à exécuter de manière parfaitement régulière toutes les étapes de sa fabrication et réussir des soudures les plus discrètes possible, voir même invisibles.

Les chaînes les plus simples sont les chaînes  » forçat  », de triste référence, elles sont aussi les plus solides. Elles sont en général fabriquées avec du fil rond.

Les chaînes  » gourmettes  » sont faites à base de chaîne forçat, chacun des maillons de cette chaîne se couchant sur le suivant, ainsi ses maillons sont tous de même forme et de même position. Il en existe une multitude de variétés, avec des maillons plus ou moins allongés, des maillons très serrés avec le dessous plat et le dessus en forme d’ogive, certaines seront faites d’anneaux courts et longs alternés.

Les chaînes  » jaseron  » sont faites de maillons ronds constitués de fil demi-jonc, ces chaînes sont régulières et sont aussi profonde que large.

Les chaînes  » torsade  » sont aussi faites d’anneaux ronds, mais sont en réalité plusieurs chaînes identiques incluses l’une dans l’autre, ces chaînes si bien faites peuvent être extrêmement solides, par contre lorsque faites de fil creux, elles ne valent pas grand-chose.

Les chaînes dites  » vénitienne  » sont faites d’anneaux carrés, elles manquent un peu de souplesse et sont malheureusement rarement bien fabriquées et ne sont pas facile non plus à réparer.

Viennent ensuite les chaînes  » Figaro  », les chaînes palmiers et colonnes, les chaînes serpent, les chaînes boules, les chaînes grains de café, etc, etc….

Une chaîne ne peut pas être plus forte que le plus faible de ses maillons, ce principe est simple et pourtant d’une très grande vérité.

La fabrication de toutes les chaînes demande une très grande régularité, j’y reviendrai souvent……

J’ai décidé avec ce site internet de rendre public tous les aspects de mon travail d’artisan, par contre si mes écrits étaient utilisés pour fin d’enseignement, je demande d’en nommer très clairement l’auteur. Il me fera aussi grand plaisir de répondre à toutes questions permettant de préciser un peu plus mes propos pour faire encore mieux comprendre les aspects et nuances de ces techniques.

Comme pour tous les bijoux, tout commence par un simple lingot. Celui-ci fait quatre millimètres d'épaisseur et pèse dix grammes soixante, ce qui sera largement suffisant pour réaliser ce bracelet en chaîne forçat de maillons un peu allongés.

Le tréfiloir est un outil de la même famille que le laminoir, composé de deux rouleaux d'acier tournant en sens inverse, avec à leurs surfaces des cannelures en dégradé et permettant de transformer un lingot carré ou rectangulaire par passe successive, en fil brut souvent de huit côtés. Une pointe plus fine que le fil permettra de le tirer dans une filière composé de trou de plus en plus petit, en général diminuant de un dixième de millimètre à chaque trou.

Cet enroulement de fil en or 18K, attaché de fil de fer est prêt à être recuit, cette opération consiste à chauffer à rouge l'ensemble, pour redonner à ce fil toutes ses qualités de malléabilité et de ductilité. Le diamètre du fil choisi pour cette chaîne est de 8,1/10 mm, ce qui correspond au trou d'une de mes filières '' tungstène ''. Ces filières plus onéreuses donnent des fils parfaitement ronds et dont la surface est aussi parfaitement lisse.

Pour constituer tous les anneaux nécessaires, le fil d'or sera enroulé sur un mandrin, ici de 11,3/10 mm X 41/10 mm. Les mandrins peuvent être fabriqués à partir de deux tiges rondes soudées l'une à l'autre, à partir d'un simple clou en fer et laminé à la bonne épaisseur, à partir d'une bande de métal découpée dans du plané d'acier ou de fer, ces deux métaux étant largement préférables à toutes autres. Un mandrin doit être résistant et pouvoir supporter le recuit des métaux précieux qui s'y enrouleront. Pour que les anneaux puissent sortir facilement de ce mandrin, une solution facile est d'entourer une feuille de papier à cigarette, qui brulera facilement au recuit pour laisser sortir facilement la cannetille produite. Même si le tabac a mauvaise réputation, j'ai un grand faible pour la beauté de ses papiers à cigarettes, leurs présentations sont souvent de haute qualité et les dessins en filigrane sont d'une précision remarquable, je rêve d'en faire collection, il faudra que j'y songe. Une simple feuille de papier à cigarette comme celle-ci donnera une nouvelle épaisseur de 12,2/10 mm X 42/10 mm, soit un dixième de millimètre de plus que la cote du mandrin lui-même.

Avec dans la main droite une merveilleuse pince '' Vise grip '', le fil d'or sera maintenu fermement sur le mandrin, l'autre extrémité du fil d'or sera tenu fortement dans un étau, et en gardant une tension régulière sur le tout, on tournera lentement la pince pour enrouler le fil, cette régularité est capitale pour obtenir des maillons de même forme et de dimensions rigoureusement identiques. Cette opération est particulièrement importante pour les chaînes gourmettes, constituées d'une chaîne forçat tournée sur elle même sur plusieurs tours, la moindre différence de régularité à cette étape en fera une chaîne complètement ratée. Une fois recuit, le papier à cigarette étant complètement brulé, il sera facile en tirant sur le mandrin de dégager la cannetille d'anneaux. Sur la photo celle de gauche est recuite et dérochée, celle de droite ne l'est pas encore.

En tenant fermement dans ses doigts la cannetille, le sciage de ces anneaux a été fait avec une scie 8/0. Là aussi la régularité est super importante, elle permettra de refermer les anneaux avec un ajustage parfait en prévision de la soudure. Il est utile à ce stade de faire plus d'anneaux que le nombre de maillons nécessaires pour le bracelet.

De fins paillons de soudure ayant une épaisseur d'environ deux dixièmes et demi de millimètre seront insérés avec une pince plate dans la fente d'une douzaine de maillons pour l'instant........ seuls. Pour cette opération, je dépose tous les paillons sur un tas en acier, ils sont ainsi facile à choisir et à prendre avec un doigt en les faisant glisser sur le bord de ce tas, ensuite les prendre sur la doigt avec la pince plate et pointue est un jeu d'enfant...ou presque.

Pour que la soudure se fasse facilement et rapidement je mets du borax avec un pinceau sur chaque maillon, que je passe ensuite au dessus de la flamme d'une bougie, le borax se boursoufflant, comme sur la photo, je suis certain qu'il est en quantité suffisante et qu'il ne partira pas lorsque les maillons toucheront la surface d'amiante de synthèse juste avant la soudure.

La soudure de ces douze anneaux, ainsi préparés, ne prends que quelques secondes, mais il est quand même bien important de regarder attentivement le comportement de chacune des soudures au moment de fondre......question de.......régularité. Une fois soudé et déroché, je reprends à la lime aiguille triangle fine, chaque maillon pour faire disparaître complètement la surface de la soudure. Je referai cette opération après toutes les autres soudures.

Cette fois, deux maillons sont ajoutés à chaque maillons de ceux déjà soudés, et la même préparation avec borax est mise en place pour réaliser cette fois vingt-quatre soudures en quelques instants. Ce travail se fait sans effort et est des plus reposant.

Maillons par groupe de trois soudés Nous voilà avec trente-six maillons soudés, trois par trois, tous identiques, prêts à se faire unir par de nouveaux collègues.

Même méthode avec cette fois six sections de chaîne de chacune sept anneaux soudés.

Et maintenant trois fois quinze anneaux... la chaîne progresse bien.

Là voici d'une seule section prête à des retouches qui lui donneront une régularité encore plus grande. Elle se compose maintenant de quarante-sept maillons, il en fallait quarante et un pour faire un bracelet de 19,5 centimètres total. Les mailles excédentaires seront simplement mises de côté pour un prochain bracelet ou un prochain collier.

En se servant d'une extrémité du mandrin, modifié comme sur la photo, et d'une pince plate parallèle, je suspends la chaîne à ma lampe d'établi, pour pouvoir ainsi avec la main gauche mettre le petit bout d'acier à l'intérieur de chaque maillon, pour avec la pince parallèle, écraser gentiment le maillon qui prends appui sur la section du mandrin, ainsi tous les anneaux sont rapidement de même largeur. Cette opération ne prends que quelques minutes.

Pour ces petits bracelet de chaîne or j'utilise ces fermoirs type '' crabe'' ils sont estampés et très fiables, ils remplacent à merveille, feux les anneaux ressorts, qui de toutes façons avaient fortement baissés en qualité depuis les dernières années. Pour l'autre extrémité, je fabrique toujours une sorte de bélière, ici avec du plané à six dixièmes de millimètre, un simple anneau rond, comme on le voit souvent n'étant absolument pas sécuritaire, le tout pouvant se décrocher facilement.

Vient maintenant le polissage de l'intérieur des maillons avec du ruban de coton et de la pâte à polir, quelques mouvements et le côté mat de l'or déroché disparait rapidement....mais il faut le faire pour les quarante et un anneaux......patience donc.

Ensuite un polissage avec un disque de feutre sur toutes les surfaces extérieures des maillons pour enlever les traces de pince et de papier d'émeri. Cela peut sembler long mais la beauté de la chaîne n'en sera que plus belle. Reste alors une étape de polissage final faite avec le tour à polir, en tenant bien fort dans ses doigts le bracelet bien fermé. Pour nettoyer ce bracelet, la dernière étape étant de faire chauffer le liquide de l'ultra son, composé d'eau, d'un peu de nettoyant ménager à base d'ammoniaque et d'une petite quantité de savon à vaisselle, très efficace, toujours sous la main et peu coûteux.

Vous penserez peut être que tout ce travail est d'une autre époque, qu'il est maintenant inutile, que les industries en font de semblables...et bien non.....pas de si beaux et si solides. Car avec cette méthode, l'artisan est libre, les modèles de chaînes sont sans limite, et en prenant en note toutes les cotes de ces chaînes faites à la main, l'artisan pourra toujours dire oui à un client qui lui en fera commande, et en étant aussi ouvert à toutes les nuances possibles. Question de liberté, et puis en écoutant de la belle musique ou des conférences sur internet, faire de la chaîne est un réel plaisir....à votre tour...... Belle et bonne journée en atelier et même chose à la maison. Merci de m'avoir lu.....à bientôt. Michel Zimmermann Artisan Bijoutier-Joaillier Québec le 13 septembre 2009 Suivront dans ce chapitre d'autres modèles de chaînes......avec le temps........